L’unicité des ressources non partageables est la principale source de désaccord qui fait que les humains se combattent entre eux et qui les pousse à dominer leur terrain de chasse et ceux qui y vivent. Paradoxalement, ce qui incite les humains à s’associer est la mise en commun de ressources non partageables pour réaliser un projet censé être plus profitable aux participants que s’ils étaient restés indépendants, chacun pour soi. Il faut noter que dans le pire des cas, le bénéfice du plus faible et plus soumis peut se résumer à rester en vie un peu plus longtemps. Pour cela, des structures sociales établiront les règles de partages qui seront respectées tant que la société les acceptera dans son ensemble, sinon il y aura une scission qui s’installera et qui pourrait dégénérer en conflit. L’art de maintenir cette cohésion est la hantise de tous les Dominants, qui n’hésiteront pas à réduire au silence toutes les oppositions.
Les moyens pour obtenir ce silence sont inépuisables. Les «effacements», assassinats ou bannissements, peuvent se réaliser de manière purement psychique aussi efficacement sinon plus que physiquement. C’est même les méthodes mentales qui sont privilégiées par ceux qui ne veulent pas laisser de traces afin que leur «juste autorité» soit le moins possible remise en cause. Comment se révolter contre un généreux bienfaiteur?
Or, tout est message: les gestes, les sons, les aspects… L’une des caractéristiques de l’intelligence est l’imitation. Dès les premiers moments de la vie, un humain va imiter celui qui le rassure le plus et avec qui il doit rapidement communiquer ses besoins. Le langage maternel, ou initial, non seulement verbal, prend ainsi bien plus de valeur que tous les autres. De lui dépend instinctivement la survie. Ce mimétisme, qui ne s’arrêtera pas d’ailleurs, va instaurer toute une série de lois tacites de comportement. Or ceux-ci, chez les modèles à imiter, sont imprégnés de lois établies cette fois à partir de religions ou de philosophies. Ainsi, la langue et la religion ont une telle importance dans la structure interne et relationnelle d’un individu qu’il deviendra aisément un cheval de bataille pour unir et désunir les groupes, pour signifier son appartenance ou son rejet. La plupart des guerres s’appuient sur la langue ou la religion. Et tous les militants, tous les guerriers ont des uniformes.
Enfin, devoir toujours respecter l’autre ne veut pas dire s’écraser dès que son droit à la sécurité est menacé. Pour cela, il faut trouver des solutions le plus possible consensuelles, ce qui s’avère parfois très difficile quand l’hostilité est bien marquée. Souvent, l'une des meilleures solutions est un service d'ordre qui peut intervenir pour séparer les personnes ou groupes en début ou en plein conflit.
Les études comportementales observent que l’humain a besoin d’une sphère d’intimité, une sorte de volume qui maintiendrait à l’écart toute possibilité d’agression tant physique que psychique. La proxémie est très importante pour étudier les sensations de bien-être des humains entre eux en fonction des distances occupées dans les relations. Il ne faut pas la confondre avec l’espace vital.
La sphère intime n’est pas qu’un espace de contact plus ou moins rapproché. Il a été observé que ce dernier varie d’une population à une autre et probablement d’un environnement géologique à l’autre. La promiscuité semble une gêne pour tous, mais à géométrie variable, à la fois selon les us et les coutumes, les buts du contact et les circonstances opportunes, même fugitives.
Cette sphère protégeant à la fois le corps et l’intelligence a plusieurs frontières en fonction des interactions et des signaux échangés. Or, qui dit «signaux» dit aussi «intelligence pour les interpréter», donc l’influence de la culture de la niche environnementale. Cela peut devenir source de tension entraînant par exemple de replis communautaires. La masse critique n’est jamais objectivement et scientifiquement évaluée, car c’est un domaine dans lequel prédomine l’émotion.
Les frontières qui délimitent l’espace visuel ou auditif peuvent fortement varier, et elles ne sont pas nécessairement délimitées par des surfaces comme des murs statiques. Par exemple, pour le bruit qui est plus ou moins gênant selon les populations en plus des caractéristiques personnelles, c’est le niveau sonore, le rythme, la fréquence, les circonstances… qui délimitent le seuil de l’intrusion sonore. Parfois, les frontières sont purement visuelles et donc peuvent s’étendre aussi loin que la vue le permet. Les vêtements ont souvent ce type de rôle de décence en plus de celui de se protéger physiquement des désagréments de la nature.
Respecter cet espace est partie intégrante de la deuxième loi de Hôdo. Tout humain sur la planète devrait avoir ce minimum de sphère d’intimité, complètement personnel et à l’abri de toute intrusion. Chacun devrait être libre d’ouvrir ou de fermer ses portes et personne n’aurait le droit de forcer autrui à changer ses filtres. L’atteinte à ce droit serait viol ou harcèlement.
À cause de sa nature fragile et de son intelligence lente à développer, car complexe, l’humain est longtemps soumis au partage des sphères intimes de ses parents. Il sera à son tour obligé de se mêler à d’autres sphères intimes lorsqu’il procréera.
Le clan familial est la première source d’information et donc sera à la base de tout le comportement appris dans le futur même si par la suite cette base sera contestée ou même reniée. D’une part, la contestation semble systématique et plus marquée à partir de certains âges, liés sans doute à une recherche de plus grande autonomie, donc de prise de pouvoir pour changer de main la domination. C’est peut-être un comportement préinscrit pour nous forcer à toujours aller de l’avant vers des solutions inexplorées. Ce qui est remarquable à retenir, c’est que le rejet se fait en opposition à l’acquis, c’est-à-dire qu’il dépend de toute manière de l’acquis précédent. Ainsi, il est beaucoup plus fréquent de voir un anti-quelque-chose être l’inverse du pro-quelque-chose qui l’a engendré, n’ayant gagné ainsi aucune liberté: son droit de faire le contraire est devenu un devoir. Les chaînes et les boulets ont changé de côté.
Le clan familial est le premier lieu où s’applique l’usage des règles sociales. Mais c’est aussi le premier endroit où s’applique ce que nous appelons «choc comportemental» au lieu de «choc des cultures», car le choc ne vient pas des cultures en soi, mais des comportements. D’ailleurs, comment pourrait-il y avoir des différences de cultures au sein d’un clan, d’un foyer familial?
S’agissant d’un refuge, personne ne pourrait s’y ingérer, en revanche, toute membre d’un clan, quelle que soit sa taille, devrait avoir le droit de fuir et de pouvoir quitter l’association. Il y a donc des questions à se poser à la racine même des sociétés. Qui pourrait ou devrait intervenir et comment agir s’il était constaté ou déduit qu’un membre d’un clan était retenu en captivité? Car, dans l’esprit hôdon, si personne ne peut se targuer de détenir la vérité et de l’imposer à quiconque,
Il semble que l’humain ait un rapport optimisé avec une huitaine de personnes simultanément dans une action commune. Cela serait entre autres dû à sa structure mentale qui fait qu’il est capable de gérer en parallèle statistiquement ce nombre de relations.
Certains modèles estiment que pour enrichir des discussions de projets (ateliers de créativité, de crises, d’évaluations…), un groupe de travail devrait être composé de 8 à 15 personnes, dont deux qui ne participent pas aux débats, mais les aident (modérateurs, annimateurs, notateurs…). En effet, il semblerait que les discussions de travail avec des groupes trop peu importants soient aussi inefficaces que des groupes trop nombreux. Donc, soit il serait préférable de fusionner deux petits groupes, soit, en revanche, dès qu’un groupe aurait plus de 15 membres, il faudrait le scinder. Cela constituerait la cellule sociale idéale pour le Projet Hôdo.
Des analyses semblent montrer que le rendement cognitif de ces groupes est accru s’il y a au moins un tiers de femmes et un tiers d’hommes. Il semble aussi que les organisations sont plus efficaces si deux membres de ces équipes jouent un rôle privilégié: l’un étant le maître de remue-méninges favorisant l’éclosion d’idée et l’autre servant de modérateur. Ces deux rôles qui peuvent paraître semblables diffèrent principalement par leur relation: le premier doit en permanence s’effacer et le second doit souvent s’impliquer. Ces deux rôles peuvent devoir agir en tant que représentant de leur cellule avec les autres cellules de même type, interagissant ainsi avec les «pairs» des autres communautés.
Il semble aussi que l’humain s’enrichit plus, du moins intellectuellement, s’il appartient à plusieurs groupes distincts. Il serait donc profitable que chaque humain, qui n’a pas a priori vocation à être un ermite, interagisse avec d’autres cellules. Si une paire de cellules sociales se réunissaient, les représentants respectifs pourraient constituer à leur tour une «cellule idéale». En continuant ainsi, on arrive très rapidement à réunir tous les habitants de la planète sous une forme de démocratie mi-représentative, mi-directe, dont l’unité décisionnaire serait une «cellule idéale» à tous les échelons de la pyramide relationnelle. Cela créerait ainsi une sorte de confédération de confédérations en cascade, donnant le pouvoir de participation local à chaque individu, puis à chaque association, et ce, en respectant une présence féminine et masculine harmonieuse à tous les niveaux.
L’une des caractéristiques de l’apprentissage de l’humain et de nombreux animaux est le mimétisme.
L’enfant mime rapidement ses parents, et le cerveau semble être doté de zones fortement spécialisées pour s’acquitter efficacement de cette tâche. C’est logique vu la complexité de l’information à traiter depuis l’acquisition par les sens, puis la transposition de ces signaux dans le «moi», pour enfin piloter les muscles adéquats. Il arrive même souvent qu’un enfant mime des choses que les parents n’ont pas conscience de porter à la connaissance du petit cerveau.
Ces imitations engendrent toute une série de comportements qui seront des us et coutume d’un clan. Ces coutumes engendreront de véritables règles de savoir-vivre, en dehors desquelles tout non-respect peut conduire à des réactions diverses, neutres, positives ou négatives, xénophiles ou xénophobes. Or ces règles seront rarement édictées sous forme de loi. Elles existaient bien avant l’écriture. Elles paraissent parfois tellement naturelles qu’il ne vient même pas à l’esprit de les noter. Alors, certains auront la maladresse ou l’indélicatesse de considérer que, puisque ce n’est pas écrit, le contraire est autorisé.
Et comment se fait-il que parfois la différence engendre une sympathie ou une antipathie? Il y a peu d’études sur le sujet, mais on pourrait comparer la pensée à un flux, une sorte de rivière circulant entre des monts et des vallées qui seraient dessinés par les évaluations statistiques des résultats positifs ou négatifs. Lorsqu’une brèche s’ouvre, si la «pente» est en faveur de l’individu, la brèche s’ouvre de plus en plus pour laisser passer le courant et parfois même dévier le courant initial. Au contraire, si la brèche est négative, non seulement le flux ne passera pas, mais la brèche se cicatrisera, offrant plus de résistance qu’avant.
Souvent, c’est le déni qui transformera l’indifférence, voire la curiosité, en rejet, c’est la certitude d’avoir raison contre l’autre qui sera conflictuel, car cette attitude indique toujours un rejet de ce qui constitue les fondements de l’autre. Chacun croit à sa vérité, et dans ce domaine les susceptibilités sont grandes. Ainsi, souvent, trop souvent, le choc de comportement se transforme en «choc de cultures».
C’est pour ces dernières raisons que la présence de médiateurs est utile. Les qualités de modérateur ne sont pas données à tout le monde et même dans toutes les circonstances, mais pour assurer l’esprit gagnant-gagnant ou du moins non perdant entre deux camps, il est souhaitable qu’il y ait un nombre identique de médiateurs appartenant à chaque niveau d’association, c’est-à-dire voisinages, villes, peuples…
Cette forme de hiérarchie s’écarterait donc fortement de la hiérarchie politique, car elle deviendrait «fonctionnelle» et dynamique à tous les degrés. Il est important de noter que cette catégorisation sociale ne serait pas chapeautée par un chef, mais représentée par une sorte d’ambassadeur médiateur et modérateur. Il n’y aurait pas de juge suprême non plus, mais
Quant aux juges, comme aucun humain n’est à même d’être absolument impartial même avec la meilleure volonté possible parce que nos esprits sont tous enfermés dans nos petites boîtes crâniennes, leur rôle serait à revoir complètement. Et cela, d’autant plus que dans le système préconisé, il faudrait toujours respecter la parité pour représenter les unions de sous-ensembles. Or un chef d’État est un homme seul qui juge seul même s’il est conseillé par une assemblée.
Remarque préalable: Il ne faut pas confondre les «réseaux sociaux» du point de vue des sciences humaines et sociales avec le terme courant contemporain pour désigner l’outil informatique qui permet d’échanger avec d’autres personnes au travers de médias sociaux. Ici, nous parlons essentiellement des liens que peuvent tisser entre eux individus ou organisations afin de créer de nouvelles associations.
On peut constater que ce chiffre correspond à 16 cellules hôdonnes, c’est-à-dire un groupe de huit à dix personnes. Évidemment, ce n’est là qu’un modèle statistique et schématique à ne pas prendre comme une norme rigide ou une préparation pharmaceutique. Mais c’est surtout utile pour comprendre que tout système démocratique qui dépasserait quelque 22500 (150 x 150) personnes n’a plus vraiment le sens de la démocratie athénienne, car la probabilité d’une connaissance mutuelle même par personne interposée entre un élu et un électeur serait pratiquement nulle.
Ce qui intéresse quiconque, c’est principalement son environnement immédiat. Quelle que soit sa position dans la pyramide organisationnelle, chacun ne voit que la sphère proche éclairée par ces 150 lanternes. Et même si l’on souhaite en connaître plus sur le monde extérieur, cela passera par de nombreux filtres, par de nombreux témoins diluant en toute bonne foi la qualité de la transmission de l’information. La notion d’organisation d’un grand nombre de personnes pose et posera toujours les mêmes questionnements.
La liberté considérée comme un ensemble d’éléments physiques ou cognitifs doit permettre d’acquérir des satisfactions. On peut comprendre que l’association de deux ensembles différents peut simultanément augmenter de nouveaux éléments de liberté et induire un partage de liberté. Or certains éléments ne sont pas partageables définitivement ou en simultanéité. On ne peut s’asseoir sur la même chaise au même moment, on ne peut définitivement plus manger le grain de riz avalé et digéré par quelqu’un d’autre.
Lorsqu’un individu ou un groupe s’associe à un projet, il est souvent nécessaire, voire incontournable, d’avoir un ou plusieurs chefs d’orchestre avec leur hiérarchie et leurs règles propres, fonctionnelles et indépendantes des autres structures, car adaptées aux besoins qui leur sont spécifiques.
L’envie et la jalousie conduisent à vouloir s’approprier les possessions d’autrui. Dans ce cas, le partage avec l’autre se résume à une prise de possession transformant la symbiose en parasitisme, voire en prédation. C’est donc là que la domination «néfaste» intervient avec ses différents masques. Violence ou charme sont utilisés avec la même optique : réduire au silence toute résistance au partage même provisoire. Parmi les charmes utilisés pour dominer et soumettre autrui, il y a l’«amour». Aux mains d’un manipulateur, le résultat ne sera pas celui idéalisé par le mot «amour» qui sera un miroir attirant et aveuglant dans un premier temps avant de devenir un voile obscur et culpabilisant pour taire tout questionnement. C’est souvent ces chaînes qu’il est le plus difficile de briser.
Du point de vue hôdon, il est évident que l’appartenance à un projet est libre, volontaire et consensuelle.
Toute alliance spécifie des contrats qui seront acceptés par celui qui la rejoint. Qu’il s’agisse d’une nation, d’une entreprise, d’une équipe sportive… Tous les contrats devraient toujours décrire explicitement la rupture de contrat, et donc la sortie de l’association. En effet, dans l’esprit hôdon personne ne peut se retrouver piégé, pieds et poings liés à une organisation, quelle qu’elle soit. Mais tant qu’un membre appartient à cette organisation, il est censé respecter ce contrat qui définit l’existence même de cet ensemble.
Si un membre ne souhaite plus en respecter des règles, il peut œuvrer de manière hôdonne. Soit il essaie de les faire évoluer de manière constructive et consensuelle, soit il quitte l’association pour en rejoindre une autre qui lui convienne mieux, voire en fonder une autre.
Si une règle de cette association change, ce qui est logique pour des entités dynamiques, les membres peuvent de fait ne plus devoir faire partie de l’association. On est ramené au cas précédent, avec une question importante en plus, si cette association inclut le refuge d’une personne et donc l’abri physique.
Quoi qu’il en soit, maintenir de force un élément dans un ensemble serait en contradiction avec l’esprit hôdon. En même temps, le droit à l’abri est inaltérable dans l’esprit de Hôdo et doit toujours être résolu. Dans ce cas, la question est de savoir comment séparer les entités en désaccord du point de vue hôdon: divorce, bannissement, emprisonnement, soumission… sachant que chaque association a ses traditions entretenues par une majorité de ses adhérents.
La séparation semble la solution la plus simple et celle qui peut offrir un statut gagnant-gagnant, la moins incompatible avec l’esprit hôdon. C’est curieusement l’option la moins choisie par certains dominants qui veulent toujours avoir un grand nombre de sujets soumis. Et cela concerne tous les humains, toutes les associations, toutes les sociétés, toutes les cellules sociales, car la tyrannie peut exister aussi bien dans un État que dans un couple.
La rupture ne devrait pas dégénérer automatiquement en conflit, même si elle revendique et insiste sur une forme d’indépendance dans les choix de vivre et cohabiter. Ces choix sont parfois difficiles à réaliser pour de nombreuses raisons. L’une des premières est le refus de séparation de l’un des protagonistes.
Si cette attitude et les conflits qui en découlent sont incontournables à cause de notre nature humaine naturellement dominante, il est malheureux qu’elles soient exploitées par d’autres intervenants, des Dominants qui veulent profiter de la situation. Dans l’esprit de Hôdo, il faudrait trouver des solutions avec des médiateurs et des créateurs de solutions consensuelles. Ils auront pour tâche de mettre en avant la richesse de la diversité et celle de la synergie qui peuvent prendre de nombreuses formes sans aboutir à des guerres trop souvent mortelles.
La séparation de type divorce n’est jouable que si chaque partie conserve son abri socioculturel dans lequel se trouve son refuge. Peut-être faudrait-il parfois considérer la signification et l’application chinoise de l’expression «Un pays, deux systèmes». Mais que faire si le conflit menace la structure qui héberge le dissident? Le bannissement semble être une solution à condition de toujours respecter les deux premières lois de Hôdo. Il faut s’assurer obligatoirement que l’exclu a bien toujours un abri tant privatif que social. Une solution serait de permettre, voire d’aider, le banni à rejoindre une autre association qui lui proposerait un refuge.
Ensuite, ce choix ne doit pas être irrévocable et surtout pas moralisateur. Il s’agit uniquement d’écarter ce qui est source d’agression tant qu’un consensus convivial n’est pas atteint.
L’exclusion d’un membre peut s’avérer impossible. Alors, à défaut de ne pouvoir offrir un abri dehors, il faudrait se résoudre à offrir un abri dedans, donc en arriver à une sorte d’incarcération ou de placement en résidence surveillée en guise de «quarantaine».
De plus, l’emprisonnement peut être indispensable pour maintenir en «quarantaine» un individu dangereux pour la société, mais il faudrait considérer avec circonspection la notion de dangerosité. Dans l’état actuel, le flou dû à l’absence de réflexions scientifiques débarrassées de toutes émotions moralement politisées impose une certaine prudence quant aux concepts de détention et de sa motivation. Pour Hôdo, autant que possible, il faut être en mesure de «soigner» dans ces lieux pour permettre un retour dans la société. Mais là aussi, il faut vraiment savoir ce que signifie la notion de «soigner».
La «quarantaine» devrait aussi être proportionnelle aux récidives. En effet, il est impossible de prévoir avec certitude quelle sera la qualité de resocialisation d’un individu. Il s’en suit, malgré toutes les précautions prises pour la réadaptation et la libération, que la personne peut rechuter dans un comportement néfaste. Une idée serait de multiplier chaque fois par deux la durée de la quarantaine précédente. L’effet de punition semble parfois indispensable dans une éducation.
À force de multiplier par deux la durée de la quarantaine, même une petite détention peut devenir très longue. Et si le temps d’incarcération devient «à perpétuité», peut-être aussi, faudrait-il accepter la demande d’euthanasie du prisonnier qui sachant qu’il ne s’en tirera pas, demande de quitter la scène. Pour Hôdo, accepter l’euthanasie peut être une marque de respect de l’intelligence d’autrui, surtout quand celui-ci souffre même et surtout dans son esprit.
Dans une association hôdonne, il y aurait obligatoirement acceptation et respect des trois règles fondamentales dès l’instant où l’on se dit hôdon. Mais en plus, pour protéger le bien acquis par la communauté, et se prémunir de tout danger, souvent il faut se soumettre volontairement aux consignes fixées par des têtes chargées de maintenir la cohésion du groupe dans un bien-être le plus possible généralisé et égalitaire. Cela ne concerne pas uniquement les notions sécuritaires: par exemple, les règles concernant les langages et d’autres types communications et de protocoles en font partie. Souvent, ces règles seront transmises au travers de l’éducation qui enseigne une certaine discipline et, donc, de l’obéissance.
Il semble que le consensus sur un très grand nombre de membres soit pratiquement impossible. En même temps, l’égalité de droit diminue toujours l’espace de liberté, et donc certains se rebellent pour agrandir leur domaine de liberté, c’est-à-dire leur domination. Or ne dit-on pas que la liberté s’arrête là où commence celle d’autrui?
Et qui donc se chargerait de la mission de protéger les gens contre les agressions sous toutes les formes? Pas seulement celles qui viennent d’un gangster ou d’un guerrier ennemi, mais celle du voisin qui piétine votre liberté au nom de la sienne? Il semble inévitable de penser à l’existence d’une police ou d’une armée, des organismes composés d’experts, car ce n’est pas chaque humain qui sait comment se comporter dans des situations de stress auxquelles il n’a pas été préparé. Ou alors il faudrait enseigner à tous, si possible, très tôt, la self-défense ou que chacun expérimente une activité dans un service civique! Mais cela aussi peut être considéré comme une atteinte à la liberté. Liberté et égalité sont difficiles, voire impossibles, à concilier à cent pour cent.
Aussi, pour pallier le problème du difficile équilibre entre liberté et égalité, la démocratie a été inventée comme un moindre mal à défaut de consensus. La soumission librement consentie1 à des règles de cohabitations reste incontournable bien qu’elle soit délicate à mettre en œuvre.
Ces domaines sont des États, Empires, Royaumes, Républiques, Fédérations, Unions… Ils ont leurs avantages qu’il est difficile et vain de réduire à zéro. Plus le nombre d’interactions est grand, plus chaque individu a des chances d’enrichir son bien-être par un confort qui devient réalisable en unissant les connaissances et les compétences du groupe. Mais partager implique de négocier. Et plus le domaine est grand, plus il est difficile de négocier de la même manière pour tous sans normes.
Le premier avantage des grandes associations est celui de la communication «normalisée». Communiquer ne se fait pas seulement au travers du langage et de l’écriture. La gestuelle, le comportement en général sont eux-mêmes porteurs de messages décodés différemment selon les niches environnementales des populations. Ce qui est anodin pour certains peut être obligatoire pour d’autres. Un geste non hostile, voire amical, pour l’un peut être traduit comme une menace agressive par l’autre. Aux comportements, on peut ajouter l’apparition de symboles, comme le vêtement, le tatouage, et la «monnaie» avant que celle-ci ne devînt «divinité».
Qu’on le veuille ou pas, les êtres vivants dont fait partie l’humanité réagit beaucoup plus vite aux dangers qu’aux plaisirs. Une drogue attire par le plaisir qu’elle procure, elle enchaîne par la menace de ne plus avoir de plaisir. Il s’en suit qu’il faut rester prudent quand on parle d’«amour» et garder son sang-froid quand on parle de «menace». Les Dominants et leurs candidats utilisent ces deux leviers pour s’imposer. Alors, avons-nous besoin de dominants? C’est peut-être la première question à se poser. Le fait de choisir un langage, une écriture, une conviction philosophique ou religieuse pourrait concerner que les individus, mais les langages et les styles de vie devraient de toute manière être harmonisés pour permettre une certaine synergie. C’est précisément cette recherche de synergie qui pousse les grands Dominants à imposer leur style de vie. Quel choix reste-t-il à l’individu dans ce modèle? Celui du virus ou du grand mammifère? De toute manière, il semble que le virus ne survit que grâce à des vies communautaires supérieures à lui. Quant au grand mammifère, quelle cellule de son organisme, pilote et domine sa conscience? Le saura-t-on un jour? En attendant, la seule solution qui semble envisageable est de type de hiérarchie fonctionnelle pyramidale.
De toute manière, en plus des deux lois concernant l’une, le devoir de respecter l’intelligence et l’autre, le droit à l’évitement et au refuge, la troisième loi de Hôdo préconisent le consensus ou le hasard dans toutes les décisions communautaires. Néanmoins, l’expérience montre que le consensus est presque impossible à atteindre lorsqu’il y a plus de huit intervenants. C’est pour cette raison que dans l’esprit Hôdo les formes démocratiques actuelles, et surtout les démocraties directes et non proportionnelles, n’ont pas de véritable sens. D’autant plus que les candidats à une dominance proposent un «pack» et en général jamais de référendum pour chaque élément du «pack», surtout contenant une centaine de propositions comme c’est parfois le cas. Le référendum aussi est inadapté, car, sauf en décortiquant chaque proposition en élément binaire, il ne représentera jamais toute la palette de combinaisons. On est donc amené à devoir choisir entre la boule rouge et le cube vert alors que l’on voudrait une boule verte. C’est aussi pour cette raison que l’esprit Hôdo préconise un consensus par petits éléments d’arborescences fonctionnelles, ce qui n’est pas et ne peut être une forme de hiérarchie au niveau social sous forme de «classes».
On pourrait penser que dans l’esprit hôdon une association rassemblant la planète n’a pas de sens, car elle ne respecterait peut-être pas la deuxième loi de Hôdo qui permettrait de sortir d’une organisation qui ne convient pas. Pourtant, peut-être serait-ce bien qu’en interne et pour l’exemple, les organismes internationaux tels que l’ONU adoptent les trois règles fondamentales de Hôdo.
Plus qu’une ONU, il serait intéressant de promouvoir une Organisation consensuelle pour non seulement faciliter par la médiation la vie en communauté sur notre planète, mais aussi pour œuvrer à la protection de la Terre. Il semble logique que des problèmes concernant la planète entière soient gérés pour et par tous, car la nature n’a pas les frontières des humains. Hôdo propose par exemple le «revenu de Gaïa» identique à tout humain vivant sur la planète et une monnaie énergétique qui indique le prix total de la création d’un objet quelconque, lequel étalonnage ne pourrait être réalisé que par un conseil neutre et objectif d’experts.
La notion de refuge de la deuxième loi de Hôdo imposerait que chaque humain dispose d’un territoire qui lui soit propre de sa naissance à sa mort. Et si ce territoire était plus qu’un simple toit sur la tête. Ne serait-ce pas merveilleux pour chacun, pour chaque communauté et pour la planète de disposer de trois parts avec des droits et des devoirs respectifs: